Durant ma carrière, j’ai participé à des centaines de conférences en tant qu’intervenant, et j’ai été plusieurs dizaines de fois organisateur ou membre du comité de sélection. Dans cet article, je vais partager quelques techniques et astuces que j’ai utilisées pour avoir le meilleur line-up possible.
Ces techniques peuvent servir aux organisateurs de conférences, aux comités de sélection, aux track hosts, mais aussi aux volontaires et bénévoles qui filent un coup de main dans des conférences communautaires ; car comme on va le voir, l’effort va être collectif et impliquer des gens à tous les niveaux !
Posons le cadre
Je vais surtout parler des conférences de la « tech », et plus particulièrement de celles qui sont focalisées (au moins en théorie) sur les présentations.
Aujourd’hui (en 2025) cela va inclure, entre autres:
- des événements internationaux comme KubeCon, QCON, PyCon, Devoxx;
- des événements qui se déclinent souvent par pays ou par ville, comme les DevOpsDays, ContainerDays, CloudNativeDays;
- des événements exclusivement français comme WAX, CloudNord, VolCamp, DevFest.
(Évidemment, ces listes ne sont pas exhaustives, c’est juste à titre illustratif pour qu’on comprenne bien de quel genre de conférence on parle!)
Cela peut inclure les conférences « vendor » organisées par une société de la tech (comme DockerCon, VMworld, re:invent) car la plupart du temps, ce dont je vais parler ici s’applique aussi à elles.
La recette, en théorie
C’est facile : il faut trouver les meilleur·es intervenant·es possibles, et leur demander de venir. Voilà ! 😁
Bon, ça a l’air simple, mais il faut commencer par se mettre d’accord sur ce qu’on entend par « meilleur ».
Je vais partir d’une hypothèse : quand on organise une conférence « à talks », on souhaite avoir un maximum de monde, et on souhaite que ces gens soient contents (afin qu’ils aient envie de revenir l’année suivante).
Il faut donc que le programme (les titres et descriptions des talks et leurs intervenant·es) donne envie de venir, et que le contenu (les talks à proprement parler) donne envie de revenir.
Pour donner envie aux gens de venir, on peut inviter des célébrités (mais elles ne seront pas forcément disponibles, et/ou peut-être qu’elles demanderont un cachet prohibitif), mais on peut aussi proposer des sujets qui vont les intéresser.
Le truc, c’est qu’il n’y a pas (ou très peu) de sujet universel qui va intéresser tout le monde. Une DSI du CAC40 ne cherchera pas la même chose qu’un SRE junior. Il va donc falloir proposer un éventail de talks couvrant de nombreux sujets.
Ça ne veut pas simplement dire « on va parler d’IA, de Kubernetes, de réseau, et de developer experience ! » mais de manière plus vaste, qu’on va avoir des présentations plus ou moins techniques, parlant à des profils différents.
Évidemment, il va falloir communiquer clairement sur les cibles de ces talks, pour éviter que notre SRE junior ne se retrouve dans un talk comparant des modèles de gouvernance permettant d’assurer la mise en place efficace de processus de conformité ISO 27001 et PCI DSS pour des sociétés internationales, tandis que notre DSI du CAC40 se retrouverait devant un talk sur la mise en place d’un runtime WASM sur Raspberry Pi pour faire tourner Doom en pilotant des bandeaux de LED adressables.
(C’est le gros challenge avec les méga-conférences comme KubeCon : d’accord, il y a 300 talks, donc il y a forcément quelquechose d’intéressant dans le tas ; mais d’expérience, ça me prend facilement une demi-journée complète rien que pour parcourir le programme en entier histoire d’être sûr de ne pas rater la perle rare.)
Concrètement, comment s’y prendre ?
La recette, en pratique
Je vais citer Radio Londres : « les Français parlent aux Français ! »
(On me fait signe qu’il va falloir expliquer un peu ce que j’entends par là. Allons-y!)
Rien de tel que :
- un·e SRE pour parler à d’autres SRE,
- un·e CTO pour parler à d’autres CTO,
- un·e spécaliste réseau pour parler à d’autres spécalistes réseau,
- un·e étudiant·e pour parler à d’autres étudiant·es (quand le sujet est « comment j’ai appris à utiliser la techno XYZ » par exemple),
- etc.
Entendons-nous bien : ça ne veut pas dire que seul·e un·e SRE peut parler à d’autres SRE. Il ne s’agit pas d’une règle d’or inflexible.
Mais au-delà des sujets techniques, cela s’étend aussi au style des intervenant·es, leurs langues parlées, leurs références culturelles.
Commençons par enfoncer une porte ouverte : pour que j’apprécie pleinement un talk, il vaut mieux qu’il soit en français ou en anglais. J’ai déjà assisté à des talks en allemand, en russe, en portugais, et même en mandarin. On ne va pas se mentir : sans traduction instantanée, c’est un peu chaud. 😱
Mais au-delà de ça, le style, les expressions, l’humour d’un·e intervenant·e va énormément jouer dans la manière dont sa présentation va être reçue. Prenons l’exemple de l’humour : ayant grandi dans les années 80, je vais sûrement être plus réceptif à un talk qui va contenir des blagues venant de la Cité de la Peur, Kaamelott, ou des Monty Python ; tandis que quelqu’un qui aura eu son bac en 2020 sera probablement indifférent à des allusions aux œuvres d’Audiard ou de Desproges, et trouvera peut-être l’humour des Inconnus pas si marrant que ça (à tort ou à raison, c’est un autre débat).
Bien sûr, l’humour et les blagounettes ne font pas toute la qualité d’un talk. Mais les références culturelles nous permettent d’avoir des expressions, des métaphores, permettant de faire passer un message de manière plus efficace.
(Petite parenthèse linguistique, parce que c’est un sujet qui me passionne à titre personnel : je me demande quelle est la proportion de gens, par tranche d’âge, qui comprennent immédiatement des expressions comme « passer la seconde », « disque rayé », « être aux abonnés absents »… et si ces expressions continueront à être comprises quand il n’y aura plus de voitures à essence, plus aucun support numérique rotatif, et plus de réseau téléphonie fixe.)
La recette, concrètement
Ça veut dire qu’il va falloir s’assurer d’avoir des propositions de talks venant de tous les horizons. Pour ça, il faudra communiquer au maximum en amont pendant la phase d’appel à propositions (ou le fameux CFP, Call For Proposals).
Sinon on risque de se retrouver toujours avec des propositions venant des mêmes personnes : ou bien les gens de notre réseau immédiat (qu’on a pu facilement toucher via nos communications) ou bien les gens dont c’est le métier, et qui ont des outils et des process pour se tenir au courant de toutes les conférences pouvant les intéresser.
C’est d’ailleurs un des buts avoués de cet article : faire parler de l’appel à propositions de Cloud Native Days France, afin d’y voir des nouvelles têtes.
Si vous avez lu jusqu’ici, et que vous avez une histoire Cloud Native intéressante à raconter … Je vous invite à la proposer au CFP de Cloud Native Days France.
OK, mais qu’est-ce que c’est, une « histoire Cloud Native intéressante » ?
Option 1 : vous pouvez jeter un œil au programme de KCD France 2023 pour voir le type de présentation qui ont été acceptées à l’époque.
Option 2 : ma définition personnelle d’un talk intéressant, c’est : le talk que j’aurais aimé voir il y a 6 mois, 1 an, 2 ans … Parce qu’il traite d’un sujet sur lequel je viens de monter en compétences, et si ce talk avait existé, j’aurais gagné du temps. Pour le dire autrement : le meilleur moment pour faire un talk, c’est juste après avoir appris plein de trucs sur un sujet donné. On n’est peut-être pas expert·e pour autant, mais on a des choses à partager.
Peut-être que vous avez cherché à faire un truc particulier avec Docker, Podman, Kubernetes, Argo, Kyverno, que sais-je ; ou tenté de contribuer d’une manière ou d’une autre ; et au début, ça n’a pas marché, et vous n’avez pas trouvé des tonnes de doc ou d’information, mais vous avez fait des recherches, des expérimentations, et au final, vous êtes arrivé à quelque chose : bingo, il y a probablement matière à un bon talk.
(Et si, quand vous en parlez autour de vous, les gens réagissent en disant « ah ouais tiens ça m’intéresse ça, t’as fait comment ? » c’est un très bon signe!😁)
Oui, mais …
« Je ne sais pas comment présenter ma proposition ! »
Honnêtement, ne vous prenez pas la tête. Soumettre à un CFP ce n’est pas un grand oral. L’important c’est de dire ce dont vous allez parler. Soyez précis : dites exactement quels outils vous avez utilisé (par exemple « on a utilisé des policy Kyverno pour limiter la consommation de VRAM des GPU NVIDIA » plutôt que « on a utilisé un moteur de contrainte pour gérer les ressources d’un workload de machine learning », sauf si en effet vous avez généralisé votre technique à n’importe quel policy engine et à tous les types de ressources concernés). Faites comme si vous envoyiez un message à un collègue compétent, bienveillant, et intéressé, qui connaît le sujet et la problématique, mais qui ne connaît pas encore votre solution. C’est ça qu’on veut lire !
« Je n’ai jamais fait de talk / je ne suis pas bon speaker »
Bonne nouvelle : on fera tout notre possible pour que votre présentation soit excellente, grâce à des suggestions, du coaching, des répétitions si vous le souhaitez. À titre personnel, je ne pense pas qu’il y ait des bons ou des mauvais speakers, ou plus précisément, je pense que personne ne naît « bon speaker ». C’est comme tout : ça s’apprend. Et parce qu’on a envie de voir des nouvelles têtes à Cloud Native Days en 2026, on va vous aider !
Dans quelques jours, je sortirai un prochain article pour expliquer comment on va aider nos intervenant·es à donner leur meilleur talk.
En attendant, voilà quelques données importantes :
- date de clôture de l’appel à propositions : 5 octobre 2025
- date de la conférence : mardi 3 février 2026
- taille et lieu de l’événement : plus de 2000 personnes à Paris, France
Pour soumettre votre proposition, c’est par là!